La cessation du contrat d’agent commercial

La cessation du contrat d’agent commercial

Le contrat liant un mandant et un agent commercial est un mandat d’intérêt commun. Il est régi par le Code du commerce qui précise en son article L.134-4 que « les contrats d’agent intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l’intérêt commun des parties ». La cessation de ce contrat répond donc à des règles très précises.

La rupture du contrat à durée indéterminée doit être notifiée à l’autre partie mais aucun formalisme à ce sujet n’est imposé par la loi. Un courrier recommandé ou une lettre remise en main propre contre décharge suffisent pour éviter toute discussion quant au principe de la rupture et de sa date de prise d’effet.

Le CDD sans clause de reconduction tacite prend fin automatiquement à l’arrivée du terme du contrat. Lorsque le contrat est rompu, l’agent commercial n’a plus à fournir de prestation au mandant et se doit de remettre à ce dernier tous les documents fournis tels que tarifs et échantillons. L’agent commercial perçoit alors une indemnité de fin de contrat justifiée par la nature du mandant d’intérêt commun. En effet, il va perdre le bénéfice de la valeur de la clientèle qu’il a contribué à développer alors que le mandant en conserve l’exploitation. L’indemnité de cessation du contrat a donc pour objet de l’indemniser pour cette perte.

Rupture à l’initiative du mandant pour faute grave ou cas de force majeure

La faute grave est définie par la jurisprudence comme la faute « portant atteinte à la finalité du mandat d’intérêt commun et rendant impossible le maintien du lien contractuel » (Cass com., 15 octobre 2002 n°00-18.122). La faute grave est prévue à l’article L.134-12 du Code du commerce comme privative de l’indemnité de fin de contrat mais celle-ci est appréciée de manière restrictive par la jurisprudence. L’agent commercial n’étant soumis qu’à une obligation de moyens, le mandant devra prouver que l’agent n’a pas mis en œuvre tous les moyens lui permettant d’exécuter sa mission. La faute grave est du fait du comportement de l’agent commercial, celui-ci porte atteinte à la finalité du contrat d’agence dans des cas tels que :

– des faits de concurrence (vente de produits concurrents du mandant, Cass. Com., 24 mai 2011 n°10-16969)  sous réserve toutefois que le mandant n’ait pas eu connaissance de tels faits et ne les ait pas tolérés ; – diffusion d’informations erronées ou dénigrement du mandant,

– baisse anormale du chiffre d’affaires résultant d’une insuffisance manifeste de l’agent commercial (absence prolongée de prospection de clientèle, Cass. Com. 12 octobre 2010 n° 09-16886 ; arrêts des salons professionnels et de visites de certains clients habituels, Cass. Com., 9 juin 2015 n°14-14.396 ; désintérêt manifeste et généralisé de l’agent commercial dans l’exécution de son mandat, Cass. Com. 9 décembre 2014 n°13-28.170.

C’est au mandant de faire la preuve de la faute grave en présentant des griefs précis et concrets aux juges qui doivent y répondre. À défaut de rapporter la preuve des faits reprochés, la faute grave de l’agent commercial n’est pas caractérisée. Et si la faute grave reprochée à l’agent commercial a été provoquée par la propre faute du mandant, la gravité en sera atténuée. Conformément à l’article L.134-13 du Code du commerce, le mandant qui aura rompu le contrat sans invoquer la faute grave ne pourra pas l’invoquer ultérieurement, qui plus est si celle-ci est commise durant la période de préavis (art.L.134-13 du Code du commerce).

À noter : une définition de la faute grave ne peut être précisée dans le contrat entre le mandant et l’agent commercial.

En cas de cessation pour force majeure, celle-ci devra être prouvée par le mandant (CA Bordeaux, 22 juillet 2014, n°13/03780).

Rupture à l’initiative de l’agent commercial

L’article L.134-13 du Code du commerce dispose qu’une indemnité de fin de contrat est due si la rupture intervient du fait « de circonstances imputables au mandant », à savoir :

– lorsque les fautes du mandant justifient la résiliation du contrat (non fourniture d’informations nécessaires telles que tarifs et échantillons, retenue du paiement des commissions dues, violation de l’exclusivité territoriale accordée à l’agent commercial). Si les griefs invoqués par l’agent commercial contre son mandant ne sont pas fondés, l’agent commercial est considéré comme démissionnaire et ne pourra prétendre à aucune indemnité (article L.134-3 du Code du commerce) ;

– lorsque le mandant impose à l’agent commercial une modification unilatérale du contrat, en dépit de l’opposition de l’agent commercial (nouveaux taux de commission) ;

– si la rupture fait suite à un refus injustifié du mandant d’agréer le cessionnaire présenté par l’agent commercial (CA Rouen, 16 avril 2009, JurisData n° 2009-003475).

Lorsque l’agent commercial met fin au contrat du fait de l’âge, de l’infirmité ou de la maladie l’empêchant raisonnablement de poursuivre son activité, ces situations n’impliquent pas automatiquement la justification d’une indemnité de fin de contrat. L’agent commercial doit faire la preuve de son incapacité à exécuter son mandat.

À noter : si la rupture du contrat est due au décès de l’agent commercial, ses ayants droits bénéficient de cette indemnité.

Clause de non-concurrence

Avec la cessation du contrat, prend également fin l’obligation de non-concurrence que devait respecter l’agent commercial sauf bien sûr en cas de clause de non-concurrence post-contractuelle. Celle doit être précisée dans le contrat et ne peut excéder une période de 2 ans. Elle doit également être limitée au secteur ainsi qu’aux produits qui étaient confiés à l’agent commercial par son ancien mandant, à défaut elle pourra être remise en cause.

À noter : cette clause de non-concurrence post-contractuelle n’a pas à être assortie d’une contrepartie financière pour être valable.

Préavis

Suite à la rupture express du contrat par l’une des parties, un délai de préavis doit être respecté. Ce dernier est généralement d’1 mois au cours de la première année, de 2 mois au cours de la deuxième année, et de 3 mois au cours de la troisième année et des suivantes. En cas de faute grave invoquée au soutien de la décision de rompre le contrat, le préavis ne peut être respecté.

Indemnités de fin de contrat

L’article L.134-1 du Code du commerce dispose que l’agent commercial perd son droit à indemnité « s’il n’a pas notifié à son mandant dans un délai de 1 an à compter de la cessation du contrat qu’il entend faire valoir ses droits ». Le montant de l’indemnité est généralement fixé à 2 ans de rémunération ou calculée sur la moyenne des 3 dernières années multipliée par 2, sans distinction de client créés ou préexistants. Par ailleurs, en cas de rémunération fixe et de commissions, l’indemnité devra être calculée sur la base de l’ensemble de ces éléments.

À noter : une clause du contrat prévoyant contractuellement qu’une majoration de ses commissions seraient une contrepartie à une indemnité de rupture du contrat n’empêchera pas l’agent commercial de prétendre à cette indemnité (Cass. Com. 17 juin 2003).

Chaque contrat liant un agent commercial et un mandant est très spécifique. En ma qualité d’avocat en droit commercial, j’assiste mes clients, mandants ou agents commerciaux, dans la rédaction de ce type de contrat ainsi que dans sa cessation.

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